En pleine crise du logement, voilà qu’un nouveau casse-tête s’ajoute au marché locatif québécois : de plus en plus de syndicats de copropriété songent à interdire la location de condos en raison du coût des assurances qui augmente considérablement.
Quand la facture monte en flèche
En cas de sinistre, comme un incendie ou un dégât d’eau, l’assurance de la copropriété couvre généralement les réparations, tant dans les aires communes que dans les unités privatives. Toutefois, la franchise, qui peut atteindre entre 2 et 5 millions de dollars dans certains immeubles de grande taille, reste à la charge du syndicat de copropriété.
Et c’est là que les choses se compliquent. Le cadre juridique québécois rend difficile le recouvrement de cette franchise auprès du copropriétaire ou du locataire responsable. Le syndicat doit alors puiser l’argent dans le fonds d’autoassurance, alimenté par les frais de condo. Et si l’assureur refuse de payer en totalité, ce qui devient de plus en plus fréquent, l’ensemble des coûts du sinistre retombe directement sur les épaules de tous les copropriétaires.

Une inondation causée par un tuyau défectueux au 21e étage peut rapidement tourner au cauchemar. Dans un cas de sinistre récent, une facture de 161 000$ a été laissée au syndicat, forçant chacun des 261 copropriétaires à débourser 616$. Selon William Subranni, directeur du développement des affaires chez Sentinel Gestion Immobilière, ce genre de situation se multiplie. « Dans la dernière année, les sinistres ont totalisé plusieurs millions de dollars. Entre 15% et 20% sont liés à des locataires que l’assureur refuse d’indemniser totalement ou partiellement », précise-t-il.
Un cadre légal à bout de souffle
À cela s’ajoute un frein juridique : deux décisions récentes des tribunaux empêchent les syndicats de poursuivre un copropriétaire pour des dommages causés par son locataire. Résultat : le syndicat doit poursuivre le locataire directement, une démarche souvent longue, coûteuse et peu fructueuse.

Sur le terrain, de nombreux locataires n’ont pas d’assurance, ou mettent fin à leur couverture en cours de bail. Certains quittent même les lieux sans laisser de trace après un sinistre. À cela s’ajoutent les copropriétaires qui omettent d’informer le syndicat que leur unité est louée, compliquant davantage la gestion. Les frais de recherche, quand un gestionnaire tente de retrouver un locataire fautif, sont aussi facturés au syndicat, donc à l’ensemble des copropriétaires. Et dans bien des cas, les sommes dues ne sont jamais récupérées.
Une dérive coûteuse
Pour pallier le manque de couverture, les syndicats doivent piger dans leur fonds d’autoassurance. Mais certains sinistres le vident complètement, forçant l’émission de cotisations spéciales salées, parfois jusqu’à 15 000$ par unité.
Sans surprise, plusieurs syndicats prennent maintenant les devants : la location sera interdite, ou fortement encadrée. Une décision lourde de conséquences dans un contexte où le Québec manque cruellement de logements à louer.
Pour en savoir plus sur les assurances et condos, jetez un œil à ces articles : Je loue mon condo, dois-je aviser mon assureur? et Assurance de copropriétés – Démystifier les différences entre les parties privatives et les parties communes!